"Le contraste entre Plovdiv et Sofia est frappant. Plovdiv fait du charme au voyageur et celui-ci est aussitôt séduit. Autant Sofia est sombre, rude, sévèrement gardée par le mont Vitocha, autant PLovdiv est lumineuse et se déploie nonchalamment au bord de la Maritsa. Elle a des rues marchandes qui conduisent à la rivière dont le courant roule les eaux bleu-gris, un parc superbe avec son kiosque à musique, une église ancienne, siège de l'exarchat, une vieille mosquée devenue monument historique et un haut quartier ou s'élèvent dans leurs jardins les demeures patriciennes qui furent grecques."
Balkans-Transit, François Maspéro, page 345.
Le weekend commence par un réveil matinal et un tramway jaune très lent vers la gare, direction Plovdiv, au Sud-Est de Sofia. On part avec le soleil, on rentrera avec lui, et en fait il ne nous lâchera pas des deux jours.
On nous a prévenu Amelie et moi : ce weekend, la chaleur serait infernale. Oh, et à Plovdiv, encore pire. On s'attend à tout. C'est notre première sortie hors de Sofia, notre premier voyage seules aussi. Un premier aperçu de la campagne bulgare, des paysages magnifiques, toutes les nuances de vert.
Une fois là-bas, nous retrouvons Mariyan, un copain bulgare qui fait ses études à Paris, et ses amis. Fin de matinée, le soleil commence à taper : on se réfugie dans un café. Ambiance tour de Babel : Mario ne parle que français et bulgare, sa cousine anglais, allemand et bulgare, et son amie anglais français et bulgare. Sachant que nous sommes Française et Allemande... Aucune langue commune ! On parlera donc un peu toutes les langues.
On s'aventure dans les rues de Plovdiv vers 5h, pour éviter le soleil aux heures les plus chaudes.
La rue principale est presque déserte. Beaucoup de magasins sont fermés. Un samedi après-midi dans une grande ville touristique. Il paraît qu'il fait 43°... On cherche l'ombre et on fait les touristes dans une ville sans touristes. Les façades en stuc de toutes les couleurs me font penser à des décors de cinéma, on dirait une ville-tournage.
La vieille ville de Plovdiv est très belle. Elle est construite sur plusieurs collines, on monte et on redescend sans arrêt. Les maisons sont rouges, jaunes vertes, chaque étage dépassant le précédent, au point qu'ils finissent presque par se toucher (voir photo ci-dessous). Lamartine a passé trois nuits lors de son voyage en Orient dans une maison qui depuis porte son nom.
A gauche, Amelie et Mario pausent pour le peintre.
Autre grande première ce weekend : soirée dans les boîtes bulgares, et en particulier dans les boîtes de "tchalga", la musique dite pop-folk en Bulgarie. En gros, la variété. D'abord, une précision sur un stéréotype faux : toutes les Bulgares ne sont pas mannequins. Mais beaucoup font tout pour, des cheveux (blonds) jusqu'aux bouts des ongles, en passant par des tenues sophistiquées et un temps de préparation... important. Beaucoup s'étaient donné rendez-vous en boîte samedi, au club rétro où on était. Changement de musique, on part pour
la boîte "tchalga", changement d'ambiance : un décor insolite, sombre, néons, et représentations de peintures antiques jusqu'aux plafonds des toilettes. Le must : derrière le comptoir, la création d'Adam de Michel-Ange. On a bien ri toute la soirée avec Amelie, Mario, Elena (le monde est très petit : non seulement elle vient de passer six mois à Sciences Po comme étudiante Erasmus, mais elle habitait alors à dix minutes de chez moi à Paris), Kati (qui nous héberge) et les autres.
Surprise le lendemain matin : Amelie et moi, on s'est enfermées (toutes seules !) dans la chambre où on dormait. Décidément, pas de chance avec les portes bulgares : en rentrant à Sofia, je découvre que ma clé de la porte de l'immeuble (qui normalement est ouverte) n'est pas la bonne (déjà que celle de la porte de l'appart non plus), et la poignée de la porte de la salle de bain a encore fait des siennes et après avoir menacé de nous enfermer plusieurs fois, elle a rendu l'âme -pas pratique. Bref, pour cette chambre à Plovdiv, on a eu de la chance, il y avait un balcon qui permettait de passer à une autre chambre sans jouer les acrobates au quatrième étage.
Visite du centre de Plovdiv le lendemain, Amelie a pris un train plus tôt.
"Ce désordre typiquement balkanique de débris d'histoire incompatibles entre eux, semblables aux fragments de magnifiques vases anciens, aux céramiques grossières ou aux pièces de monnaie verdâtres que la terre recrache aussi continûment qu'un distributeur automatique, tout cela participe sans doute du caractère intangible de la ville."
Angel Wagenstein (écrivain et cinéaste de Plovdiv), Abraham le Poivrot
Inattendu : je me retrouve au milieu d'un mariage musulman. C'est au moins le quatrième mariage qu'on croise du weekend, que se passe-t-il dans cette ville ? Une carriole attend les futurs mariés devant la mosquée, les femmes scintillent de toutes les paillettes dont elles ont couvert leur corps, leurs cheveux, et leurs robes déjà éblouissantes. Les petites filles sont des modèles miniatures, avec des couronnes sorties de contes de fée.
Retour à Sofia, des petits yeux : la fatigue, le soleil, ou le voyage en train passé la tête à la fenêtre ?
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire